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Le Devoir a publié la semaine dernière un éditorial réagissant à un reportage de Radio-Canada; celui-ci était consacré à un accord signé entre le Québec et la France qui permet aux étudiants français fréquentant une université au Québec de payer les mêmes droits de scolarité que les étudiants québécois. Le reportage soulevait la question du respect de l'esprit de l'entente pour les citoyens français qui étudient dans les universités anglophones plutôt que francophones.
En ce qui concerne l'Université McGill, nous croyons que les inscriptions des étudiants français dans notre établissement non seulement respectent l'esprit de cet accord, mais renforcent les liens étroits qui unissent le Québec et la France.
Dans le reportage de Radio-Canada, Denis Roubinet, un étudiant français de McGill, expliquait qu'il avait considéré poursuivre ses études universitaires aux États-Unis, mais que son père lui avait fait valoir les avantages de s'inscrire à McGill plutôt que dans une université américaine. Il pourrait ainsi étudier en anglais pour une fraction des coûts exigés par la fréquentation d'une université américaine. Nous pouvons sans doute présumer que la réputation internationale de McGill explique aussi son choix, de même que l'idée d'étudier dans une ville stimulante et majoritairement francophone comme Montréal.
Si cet étudiant avait choisi une université américaine, aucun lien particulier n'aurait été créé entre le Québec et la France. En s'inscrivant à l'université McGill dans le cadre de l'accord France-Québec, il profitera de son séjour au Québec pour connaître sa culture, son mode de vie et développer des liens privilégiés. Que cet étudiant choisisse de s'établir à Montréal, de retourner en France ou de poursuivre sa carrière ailleurs dans le monde, il deviendra vraisemblablement un ambassadeur de Montréal et du Québec.
Le Québec possède un réseau universitaire diversifié et de grande qualité dont nous avons toutes les raisons d'être fiers. Comme membre de ce réseau, nous nous réjouissons de l'attrait que les universités québécoises exercent auprès des étudiants internationaux en général, et des étudiants français en particulier. Sur les quelque 6,000 citoyens français qui poursuivent leurs études dans les universités québécoises, la très vaste majorité étudie dans des établissements francophones. En fait, environ 15 % de ceux-ci choisissent McGill, Concordia ou Bishop's.
En s'inscrivant à McGill, les étudiants français rejoignent une large part d'étudiants québécois francophones qui forment 18 % de notre clientèle. Ces étudiants peuvent remettre leurs travaux et rédiger leurs examens en français. Cette ouverture n'est certainement pas étrangère à l'intérêt que les étudiants français portent à McGill.
Fortement ancrée dans la réalité montréalaise, l'Université McGill constitue une force pour le Québec et un motif de fierté pour l'ensemble des Québécois. L'Assemblée nationale a d'ailleurs souligné la performance de l'Université McGill et de l'Université de Montréal qui, toutes deux, se classent parmi les 100 meilleures universités au monde, selon le Times Higher Education Supplement de Londres.
Le nombre significatif d'étudiants francophones qui fréquentent McGill lui confère un caractère unique et des atouts exceptionnels qui ajoutent à son caractère distinctif. Nous avons parcouru un long chemin depuis l'époque pas si lointaine, il y a environ quatre décennies, où McGill était critiquée par certains, la jugeant comme étant un bastion anglophone.
Laisser entendre que la fréquentation de McGill par les étudiants français constitue un effet pervers de l'entente France-Québec équivaut à la marginaliser, comme si elle était une université moins québécoise que les autres. Prétendre comme l'un des commentateurs du reportage le laisse entendre que les universités anglophones anglicisent les étudiants français relève d'une vision manichéenne d'un débat linguistique qui n'a aucune raison d'être dans le contexte qui nous occupe. Penser que les étudiants français risquent de perdre leur langue et leur culture parce qu'ils fréquentent une université anglophone est une pure fantaisie de l'esprit qui nie l'héritage de ces étudiants et le caractère français de Montréal.
Par contre, la question de la capacité des contribuables québécois de subventionner les études des citoyens de pays développés mérite certainement un débat de société.
Comme le mentionnait la principale de McGill, Heather Munroe-Blum, dans un récent discours au Conseil des relations internationales de Montréal, Hydro-Québec facture aux Québécois des tarifs d'électricité inférieurs au marché. Mais une fois ces besoins satisfaits, elle est libre d'exporter l'électricité aux taux du marché.
Comme Hydro-Québec, nos universités offrent des services aux Québécois à des prix inférieurs au marché. On peut comprendre la volonté d'avantager les étudiants du Québec et les étudiants ne pouvant payer des droits élevés. Dans le cas d'étudiants internationaux en mesure d'assumer les droits exigés, il est plus difficile d'expliquer pourquoi les universités québécoises ne sont pas autorisées à exiger les tarifs du marché aux étudiants internationaux qui en ont les moyens.
Michael Goldbloom est le Vice-principal aux affaires publiques à l'université McGill.